Si vous ne souhaitez pas lire l’intégralité de cet article en voici la synthèse
- Un contrat signé à force de loi (Code civil).
- En cas de transgression il expose ses signataires à des actions en justice (code civil et code de déontologie).
- Il peut être renégocié avec l’accord des différentes parties (Code civil).
- La non-concurrence doit être limitée dans le temps, l’espace et ne peut dépasser dans ses effets les intérêts légitimes à protéger (jurisprudence).
- Une zone surdotée, dans son ensemble, peut être un espace dans lequel un kinésithérapeute aurait intérêt à protéger ses intérêts. Cette clause n’est pas « a priori » abusive.
- Une lecture attentive du contrat avant la signature est donc nécessaire. Les conflits ne profitent à personne.
Préambule
Il conviendra d’affirmer que le syndicat ne prend pas parti pour ou contre telle ou telle « catégorie » d’intervenants, en l’espèce des titulaires versus des assistants/collaborateurs ou « des locaux » versus des nouveaux arrivants.
Nous sommes, par essence, opposés à toute limitation de la liberté d’exercer. Mais force est de constater et de rappeler que nous exerçons dans un système conventionnel. Les kinés qui souhaitent pratiquer leur art sous cette forme, signent un contrat (la convention) avec l’assurance maladie. Ce contrat fixe les différentes lignes directrices ainsi que les limites à leur exercice.
L’OMK RUN n’a ni le pouvoir ni la volonté de juger. Cela est dévolu à la justice civile et ordinale en ce qui concerne la déontologie. Nous ne rentrons pas dans les cabinets pour voir ce qu’il s’y passe. Nous ne nous mêlons pas des relations confraternelles entre les différents intervenants. Nous informons et rappelons des principes, ignorés, méconnus ou volontairement détournés.
Des conflits interviennent. Nous sommes ainsi régulièrement consultés : ruptures de contrat, disparition d’un signataire qui ne se présente pas sur son poste, non-respect de certaines clauses, affirmation de caducité, pression pour changer tel ou tel article… la liste n’est pas exhaustive.
A ce petit jeu, les kinés sont souvent très forts pour affirmer ceci ou cela quitte à appuyer « leur argumentaire » par ce qui aurait été affirmé par l’Ordre, le syndicat ou par des jugements, qu’au demeurant ils ne produisent pas.
Les soi-disant certitudes et les affirmations ne reposent donc souvent sur aucun élément probant mais sur des impressions, des « on-dit », des sentiments de… mais également sur des volontés opportunes d’aller dans le sens qui convient.
Que dit le code civil ?
Les contrats reposent sur le code civil dans ses articles 1101 à 1231-7.
- L’article 1103 édicte : « Les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits».
- L’article 1104 édicte : « Les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi. Cette disposition est d’ordre public. »
Cela signifie clairement, qu’une fois signé, un contrat doit s’appliquer dans ses différents articles et qu’il a force de loi. Ne pas le respecter expose le contrevenant à une action en justice.
Il est néanmoins possible d’en revoir les termes SI les différentes parties en acceptent le principe et arrivent à un accord. Sans cela la mouture en cours reste la seule valable.
Que dit la justice civile ?
C’est le juge civil qui s’exprime dans le droit des contrats. Après avoir été saisi, il peut le cas échéant réduire ou annuler la portée de tel ou tel point. Mais c’est loin d’être évident car le principe de base reste celui d’une libre contractualisation, en toute connaissance de cause et sans contre-lettre passée.
En cas de transgression, les sanctions peuvent ne pas être neutres.
Avant toute signature, mieux vaut donc prendre le temps de lire le contrat avec application et le cas échéant de se rapprocher de professionnels du droit.
Que dit la justice ordinale ?
Son action concerne le respect de la déontologie. Son rôle se limite donc à cette seule action. Certaines clauses dites essentielles doivent impérativement apparaitre. Force est de constater que ce ne sont généralement pas celles-là qui posent problèmes.
Une rupture abusive de contrat, même si un exercice n’a pas commencé, un non-respect des préavis et toute autre transgression seront condamnés par les chambres disciplinaires.
Dans les jugements rendus dans ce type d’affaires sont régulièrement cités l’atteinte aux relations de bonnes confraternités (art R.4321-99 du CSP), la rupture de la continuité des soins délivrés aux patients (art R.4321-92 du CSP), les mensonges et les atteintes à la probité (art R.4321-54 du CSP), la modification des conditions d’exercice (art R4321-144 du CSP).
Des interdictions d’exercer ont déjà sanctionné des professionnels non respectueux. Donc attention.
Que dit le Conseil National de l’Ordre ?
Le code de la santé publique impose notamment aux kinésithérapeutes de communiquer tous leurs contrats (art R.4321-134) et d’entretenir des rapports de bonne confraternité (art R.4321-99).
Le Conseil national propose différents contrats. Sur certaines clauses il reste naturellement fort prudent. Il sera ainsi intéressant de lire avec attention ses contrats ainsi que les notes de bas de page mais également les préambules. Certaines clauses dites essentielles doivent impérativement apparaitre. Force est de constater que ce ne sont généralement pas celles-là qui posent problème.
Que dit le Conseil Départemental de l’Ordre ?
Le CDO est l’interlocuteur de proximité du kinésithérapeute. Il est d’un abord facile, rapide mais il n’a pour autant pas vocation à s’exprimer sur tout. Il reste dans le domaine déontologique et n’intervient pas dans le champ conventionnel. Ainsi peut-il accepter l’inscription d’un kinésithérapeute dans une zone surdotée alors que la CGSS ne validera pas cette installation.
Sauf transgression manifeste d’un article du code, il ne lui appartient donc pas de s’exprimer d’une manière directive. Il peut émettre des remarques mais en aucun cas préconiser telle ou telle adaptation. En cela il suit la prudence affichée par le Conseil national concernant la liberté de contracter et les prérogatives de chaque juridiction.
Focus sur la non-concurrence
C’est sans doute le point le plus discuté. Dans un contexte de zonage les tensions se sont accrues.
La jurisprudence détermine essentiellement 3 points. Il faut que le contrat soit limité dans le temps, dans l’espace et que la limite soit proportionnée aux intérêts légitimes à protéger.
Sur la défense des intérêts légitimes à protéger les zonages ont donc modifié la donne. Ainsi la perte d’un poste lors d’une installation dans la même zone crée à l’évidence une atteinte aux intérêts du cabinet initial. Là encore il ne s’agit pas de prendre partie mais de relever des faits. Il sera ainsi intéressant de lire les indications portées sur le contrat d’assistanat délivré par le CNO :
- Dans son préambule : option 1 l’assistant s’engage à ne pas s’installer dans la zone de restriction d’installation conventionnelle qui entraverait l’installation d’une personne pour lui succéder »
- Dans son article 18 et dans la note de bas de page n°13 :
« [1]3 La jurisprudence civile considère qu’une clause de non-concurrence doit être limitée dans le temps, dans l’espace, et doit être proportionnée aux intérêts légitimes à protéger.
Il est possible de ne prévoir qu’une clause de non-réinstallation (ce qui permet à l’assistant d’effectuer des remplacements), ou encore par exemple de ne viser que l’exercice libéral.
Il est également possible de citer de manière exhaustive les noms des agglomérations visées par la clause de non-concurrence.
Lorsqu’il s’agit de grosses agglomérations, il est possible de limiter la clause à un ou plusieurs arrondissements de la ville, ou encore à un seul quartier. »
S’il s’agit là d’options, de potentialités, cela signifie donc qu’aux yeux de l’Ordre cela est possible.
Sur la limite de temps même si rien n’est formellement écrit, l’absence de mention a elle était jugée. Sans doute est-il prudent de ne pas forcer le trait en mettant une durée trop importante. Un maximum de 3 années semble raisonnable.
Sur la distance, là encore rien n’est formellement défini. Les zonages ont rebattu les cartes, notamment eu égard aux intérêts légitimes à protéger.
Ainsi dans une zone surdotée, l’installation d’un partant dans cette même zone fera irrémédiablement perdre un poste au cabinet dont il est issu. Il semble donc logique d’affirmer que la zone entière constitue « le périmètre de défense » des intérêts du cabinet initial.
Hors zone surdotée, seule la concurrence devrait sans doute être prise en compte. L’espace d’activité d’un cabinet urbain ou rural n’est pas le même. Dans le premier cas la distance sera moins grande et il pourrait alors être question de 3 à 4 km mais là encore rien n’est écrit. En secteur rural et notamment dans des communes très étendue avec une densité de population peu importante, les distances sont donc naturellement plus importantes. A chacun de voir et d’appréhender « au mieux ».